Diary of Louis Riel kept while in jail in Regina containing prayers, poetry, meditations.
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Mon Dieu! Je suis rentré dans la sainte obéissance de l'église catholique Apostolique et Romaine. Je vous en prie, par Jésus-Marie-Joseph, donnez-moi la sincérité, la franchise, la discrétion qui vous sont agréables. Je vous remets le soin de tous mes intérests et de toutes mes affections temporelles et éternelles. (Dieu pourvoit à la situation.) La logique de l'obéissance est infinie comme la volonté de Dieu. Mon Dieu! Prenez par Jésus, Marie, Joseph, le soin le plus miséricordieux de tous mes intérests temporels et éternels: Ayez soin de ma vie longtemps, ô mon Dieu, je vous en prie, par Jésus christ notre Seigneur, par la sainte Vierge Marie, par Saint Joseph! Mon Dieu! Pardonnez-moi par Jésus-christ, notre Seigneur, la précipitation et le défaut d'attention respectueuse et dévotieuse, avec les quels j'ai prononcé et écrit si souvent votre saint et adorable nom, celui de Jésus, celui de Marie, celui de St Joseph, le nom de chaque saint et celui de chaque sainte; les noms de mes vénérés patrons Saint Louis et Saint David, et le nom de chacune des choses sacrées. Remettez-moi par Jésus-christ; la peine due à ces fautes; ne me punissez pas comme je devrais l'être; mais faites-moi miséricorde tout à fait par la bonté de Votre Fils! Mon Dieu! je vous offre ma communion, en vous priant de m'exaucer. O Mon Dieu! faites, par Jésus-christ; que l'archevêque Alexandre Antonin Taché et l'évêque Grandin se déclarent ouvertement et sans aucune réserve en faveur de ma mission: et qu'ils viennent me le dire miséricordieusement pour mon salut temporel et éternel: à l'ombre de la protection de Marie Immaculée; sous la sauvegarde de Saint Joseph, notre grand protecteur, le patron de prédilection des Métis et patron de l'église universelle. Mon Dieu! faites, par la grâce l'influence et la puissance divines de Jésus-christ; que chaque danger où je suis de perdre la vie se trouve contrebalancé par un très grand nombre d'occasions et de circonstances tout à fait favorables à la conservation de mon existence; et qu'ainsi, les ressources infinies de votre Providence me sauvent continuellement du péril; et que sans cesse environné, favorisé d'un bonheur inouï, je paraisse évidemment soutenu de vous seul. Car il n'y a pas de pouvoir humain qui puisse unir comme vous le faites, à mon avantage, le secours du petit nombre des bons avec celui du grand nombre des indifférents; et faire servir au triomphe de l'église, une aussi étrange combinaison de forces que beaucoup de gens même hostiles à nos intérests, viennent augmenter incompréhensiblement. Mon Dieu! dirigez-moi par Jésus-christ, assistez-moi, par son influence divine, afin que je me prépare à la mort de manière à vous être tout à fait agréable: inspirez-moi vous-même les méditations qui porteront plus mes frères, les chrétiens et les catholiques à se bien préparer à la mort. Découvrez-moi les apperçus les plus grands et les plus édifiants au sujet du trépas, afin que, par la grâce de Jésus-christ, je les exprime simplement, sans aucune ostentation; et que j'aie le bonheur insigne de faire beaucoup de bien, aux chrétiens mes frères, aux catholiques mes bien-aimés correligionnaires. Mon Dieu! Je vous offre ma communion en vous suppliant d'exaucer la prière de mon coeur, telle que vous m'avez aidé à la formuler sur ce papier. Mon Dieu! créez en moi une intelligence nouvelle et pure; renouvelez, sanctifiez ma volonté, ma mémoire et ma liberté par Jésus-christ. O Marie conçue sans péché priez pour nous qui avons recours à vous. O Saint Joseph! O notre grand protecteur, Patron de prédilection des Métis et de l'église universelle, ayez pitié de nous, ayez pitié de moi, intercédez pour nous, obtenez-nous de Dieu toutes les grâces dont nous avons besoin! Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit. Ainsi-soit-il. 11 Août 1885 La réflexion de notre esprit se porte sur tous les sujets dont un bon nombre est insignifiants. Nous nous occupons de faire arranger un habit percé: nous nous gardons bien de le porte, si nous pouvons nous en dispenser. Mais il y a une chose que nous nous efforçons d'éloigner de notre attention, c'est le véritable état de notre âme devant Dieu. Le mal a-t-il percé la cotte-maille de notre bien-être moral? Nous n'apportons aucun empressement à chercher auprès de Dieu, le remède. Nous demeurons dans ce triste état. Et par une étrange disposition, nous nous faisons de notre insouciance un point d'appui pour nous y mettre de pied plus ferme. Nous sommes vigilants et remplis de précautions pour tout ce qui regarde nos intérests passagers d'ici-bas. Mais par rapport aux intérests de notre âme immortelle, nous nous permettons négligence sur négligence, oubli sur oubli. La négligence se fortifie tellement en nous qu'elle réussit à maîtriser notre raison: et elle l'amortit. L'inquiétude salutaire de la conscience disparaît. C'est le règne de la léthargie. L'oubli des atteintes malheureuses infligées à notre âme et portées à la santé de notre moral s'empare de nos facultés et les pousse à une sorte d'engourdissement. C'est le point où notre intelligence s'abandonne au sommeil, par rapport aux réalités de la vie future. Une fois que ce sommeil est commencé, l'homme ne fait plus que rêver aux petites choses de sa courte vie temporelle. Il marche, il parle, il agit: mais toute cette activité qu'il déploye n'est plus, devant Dieu, qu'un déplorable somnambulisme. O Mort! combien en trouves-tu qui ne soient pas dans cet état, parmi ceux que Dieu te permet d'emporter chaque jour? Parmi ceux que tu prends, combien y en a-t-il qui soient sur leurs gardes? O Béni soit le juge qui m'a dit: je fixe le jour de votre fin. Connaissez-le: je vous le signale: préparez-vous. Mettez à profit le temps que je vous donne. O Bénis soient les six hommes du Jury qui m'ont recommandé à la clémence de la Cour. O Béni soit le juge qui m'a dit: si vous obtenez grâce, je serai le premier à m'en réjouir! Mais préparez-vous! Mon Dieu! Communiquez-moi par Jésus-christ, à l'ombre des saintes intercessions de Marie, sous le bouclier des protections de Saint Joseph, les pensées les plus saisissantes de la mort; les réflexions les plus salutaires, les plus neuves; les méditations les plus originales et les plus attrayantes, les idées les plus effrayantes, au sujet de mes fins dernières; pour que je mette très chrétiennement à profit le temps que j'ai encore à vivre. La mort n'est pas un fantôme; c'est une vérité que je rencontrerai et dont je sentirai la force. Elle est aussi certainement devant moi que le chemin sur le quel je mets mon pied pour marcher. La mort attend après moi, comme l'encrier attend après ma plume qu'il désire abreuver de larmes sombres et noires. Le lit de mon repos me sert-il autant que me servira le cercueil? La respiration qui me met à l'aise et qui se fait avec tant de facilité dans mon coeur et dans ma poitrine cessera un jour: j'expirerai. Mort! tu me conquerras! Tu mettras un terme à ma vie corporelle. Et mon esprit vivra de la vie qu'il se sera faite moralement. L'idée que je me fais de la paix intérieure est-elle exacte? Si je mange à tous les repas, sans jamais penser à me mortifier, si je me revêts d'habits toujours aussi conformes à ma fantaisie que je peux les avoir, si ma vanité, mon amour propre ont plein pied dans ma conscience, si je ne prie presque pas, ou bien si je prie plutôt pour faire semblant que pour solliciter en esprit et en vérité, les faveurs du Salut, à qui ressemblé-je? Quel témoignage puis-je me rendre que je prends le ciel par force? L'avertissement que Jésus-christ m'a donné est pourtant bien explicite: «Depuis les jours de Jean Baptiste, le royaume des cieux souffre violence.» Quelle violence me fais-je à moi-même, quand je m'applique à me procurer toutes les jouissances imaginables, que je recherche mes articles de nourriture; que je m'environne de chaises bourrées et de sophas moelleux; que ma chambre à coucher est, à elle seule; toute une ville de Sybaris? O grand Dieu! Votre fils est mort en croix pour moi! et moi, je meurs sur une colline d'oreillers, sur une élévation de plumes et de duvets! Mon cercueil même est un appartement de volupté! Orgueil de la mort, peux-tu jamais avoir un trône plus somptueux que t'en a donné le dix-neuvième siècle? Mort! où mènes-tu les enfants de l'orgueil, les idolâtres de la mollesse? Je vis dans le confortable, en caressant tous les penchants de ma nature déchue. Et je peux espérer que le paradis va s'ouvrir tout grand pour me recevoir en expirant! Hélas! Hélas! un homme qui s'endette auprès des hommes ne réussit à payer ses dettes que de peines et de misères: et qui est-ce qui a donc dit qu'en matières de religion, le débiteur n'avait qu'à s'endetter tant et plus; et qu'à la fin de sa vie, il entrerait à coup sûr dans toutes les récompenses? Mais récompenses de quoi, s'il n'a fait que s'endetter? Heureux le fidèle observateur des commandements de Dieu! Heureux celui qui ne blasphème pas et qui ne jure pas! Heureux celui qui ne fait pas du dimanche un jour de paresse ou de repos sensuel! Mais qui en fait un jour de prière et de service religieux! Heureux les esprits et les corps chastres! Heureux celui qui refuse ses services aux oeuvres injustes! Heureux celui qui ne promet son temps et n'accepte de salaire qu'après s'être bien assuré de la moralité et du caractère des travaux qu'on lui demande! Heureux celui qui communique aux lettres de la loi l'esprit de droiture et qui les explique consciencieusement! Heureux celui qui n'abuse pas de sa profession! Heureux celui qui ne profane pas ses talents! Heureux celui qui prend bien les réprimandes; et qui, ayant fait quelque faute se met de lui-même au repentir!-- (Août.) Mon Dieu! Etendez immensément, par Jésus-christ, l'effet qu'il vous a plu de donner aux discours que vous m'avez fait prononcer devant la cour, le dernier de Juillet et le premier de ce mois. A l'ombre de la protection de Marie, sous le bouclier des charités de Saint Joseph, déployez l'immense effet des paroles et des pensées que vous m'inspirez, propagez-le bien au delà des Etats unis, dans toutes les contrées du monde. Nourrissez cet immense effet; Rendez-le durable, en y intéressant, par Jésus-christ, dont la puissance et la bonté sont infinies, tous les principaux gouvernants de la Puissance O mon Dieu, je vous offre ma communion, en vous suppliant d'exaucer la prière dont mon esprit résonne en vous et que j'ai consignée sur ces feuilles-ci. A l'ombre de Jésus, de Marie, de Joseph. que le Bon Dieu vous récompense de ce que vous faites pour moi, en vous rendant cent fois autant sur la terre et en vous accordant mille fois plus dans l'autre monde. Ayez la charité d'écarter de mon chemin, la mort, pour un grand nombre d'années, en combattant les influences qui veulent me faire mourir. Et de mon côté, je vas prier le Bon Dieu d'exaucer par Jésus-christ, par l'intercession de Marie, par la protection de Saint Joseph, mes prières en votre faveur; afin que loin de vous aussi passe la mort et qu'elle se présente plus tard à votre chevet seulement lorsque vous l'aurez bien attendue, que vous vous serez entièrement préparés à la recevoir; plus que cela; je demande à Dieu de vouloir bien vous envoyer la visite de la mort seulement lorsque vous l'aurez longtemps désirée; et que vos bons et beaux esprits impatients d'aller se réjouir aux cieux, auront tellement adouci la mort et l'auront transformée en joie, en délivrance et en triomphe. Palpite! ô mon esprit! ô mon âme! tressaille! La paix vous ouvre un champ et plus libre et plus beau Que la campagne ouverte ou le champ de bataille. La paix et ses fruits font reculer le tombeau! L'heureuse paix du coeur dans les plus grandes luttes Toute seule vaut mieux que tous les autres biens. Les revers, avec Elle, ont l'air d'être des chutes D'abord; pour devenir ensuite des moyens. O mes amis! La paix que Jésus-christ nous donne Produit sous tout rapport d'admirables effets. La paix qui vient du monde est précieuse et bonne Mais tous ses résultats sont bornés, imparfaits. Ayons la paix de l'âme! Et l'Infini nous ouvre Des apperçus nouveaux, gais à chaque moment. Avec la paix de Dieu, le bonheur se découvre A nos yeux Merveilleusement. Faire la volonté de Dieu nous rend plus calmes En face du danger, plus paisibles que l'eau Sans aucun courant d'air. Ouvrons bien les deux palmes De nos mains vers le ciel. Renaissons de nouveau! Sainte Vierge, obtenez qu'un torrent de lumières Vienne éclairer le genre humain. Saint Joseph! priez Dieu qu'un fleuve de prières En Jésus-christ nous sauve aujourd'hui pour demain. Une bouchée de trop dans nos repas ne peut nous faire que du mal. O vous qui vivez à l'aise, une gorgée, une bouchée de moins à vos festins ne peut vous faire que du bien. La mort a des droits de toutes espèces sur moi. Lorsque je sens la faim, c'est la mort qui m'avertit doucement de ma faiblesse et qui me fait une légère menace de m'emporter, si je ne me fortifie pas contre elle, en prenant de la soutenance. Chaque fois que le sommeil veut m'accabler, c'est encore la mort qui me donne avis de ma défaillance; et que si je ne me repose pas; elle est toute prête à conduire l'occasion jusqu'au bout et à me ravir les charmes et les douceurs de la vie. Je m'approche d'un bon feu pour me chauffer. Mon bien-être se change en malaise. Je commence à brûler. Qu'est-ce que c'est? C'est la mort qui me dit: je voudrais bien que tu demeures là; je ne mettrais pas grand temps à t'enlever. Je suis au froid: je fais tout ce que je peux pour m'en défendre. Il faut que je me rende où j'ai affaire. Je suis contraint de lutter contre le température, qui m'engourdit. C'est la mort qui se tient à mes côtés et qui se console de ne pas encore m'avoir saisi, en voyant la peine que j'ai à lui échapper. Elle me badine en quelque sorte. A tout moment elle me dit de prendre garde. Elle ne se cache pas de me suivre jour et nuit. Il n'y a pas de danger qu'elle se nuise et qu'elle manque son coup, en me disant de faire attention. Car elle est sûre de moi. Pendant que je tremble et que je réussis à grand peine à lui ôter le fil de mes jours, qu'elle est toujours sur le point de trancher, la mort me sourit